(Le Nouveau Gabon) - Environ 250 ex-agents de NEO Sécurité, une entreprise de gardiennage basée à Port-Gentil, sont sans revenu depuis plus de 11 mois. Au chômage forcé depuis le 1er janvier 2022, ils sont toujours en attente du paiement de leurs arriérés de salaires ainsi que de leurs droits légaux par leur ex-employeur, conformément à un protocole d’accord signé avec la direction générale de NEO sécurité il y a quelques mois.
« Ce protocole d’accord stipulait que l’entreprise allait nous verser nos indemnités de licenciement au plus tard en septembre 2022 », affirme Honoré Boundjanga, un ex-agent de NEO Sécurité.
Mais deux mois après la date butoir, rien n’a bougé. « Nous sommes sans nouvelle du directeur général, Ruud Gullit Mbinah. Nous avons appris que ce dernier a quitté Port-Gentil avec sa famille. Aucune explication pour justifier ce retard de paiement. Il ne veut plus répondre à nos appels », se désole Diallo Doro, qui cumule 14 ans d’ancienneté dans la boîte.
Pourtant, apprend-on, ces protocoles d’accord ont été rédigés unilatéralement par NEO Sécurité dont Ruud Gullit Mbinah est propriétaire. « Nous n’avons pas été consultés. Le directeur général a fixé les montants à verser à chaque agent sans nous impliquer. Nous avons accepté. Maintenant, la moindre des choses, c’est qu’il nous reverse ce qu’il nous a promis », soutient Kpanou Grégoire, un autre ex-employé au chômage.
Protocole d’accord
Le protocole d’accord signé par l’entreprise et ses ex-employés était fonction de l’ancienneté. « Un agent embauché par exemple en 2009 devait percevoir plus de 2 millions de FCFA. Je fais partie de cette catégorie et mon indemnité se situerait autour de 2,8 millions de FCFA. Certains avec 9 années ou moins se sont vu proposer 800 000 FCFA voire 500 000 FCFA », déplore un agent qui dit ne pas comprendre les bases de ces calculs.
Les ex-agents disent tous vivre des moments très difficiles. « La situation dans laquelle nous vivons aujourd’hui est critique. On a du mal à s’acquitter de nos loyers. Nos bailleurs nous mettent la pression. Les enfants ne vont plus à l’école. Mon épouse est malade et a besoin de soins. Nous croulons sous des dettes. Nous sommes devenus insolvables. Depuis, je n’arrive plus à trouver un autre emploi. Je suis impuissant face à cette situation », se plaint Kpanou Gregoire. Et de poursuivre : « À cause de cette situation, Martin, notre frère béninois s’est suicidé. On a aussi un collègue gabonais qui est mort ».
Comment en arrive-t-on là
Ces ex-employés étaient en poste comme agent de sécurité et offraient également d’autres prestations chez des partenaires de NEO Sécurité à l’instar de l’entreprise pétrolière Perenco. Mais, « NEO Sécurité a perdu, en l’espace de 3 mois, ses trois contrats de gardiennage auprès de Perenco Gabon, des Chantiers du Gabon et de Spie Oil & Gas. À cause de cette situation, 240 agents environ ont été licenciés. Certains ont été repris par des concurrents. Les autres sont à l’arrêt », explique un des déflatés.
Face à cette situation, ils ont saisi l’inspection de travail et même les tribunaux. Mais, sans aucun résultat jusqu’ici. « Nous sommes allés nous plaindre à l’inspection du travail depuis plusieurs mois. Ils ont convoqué les responsables de NEO Sécurité. Mais, ceux-ci ont refusé de répondre à la convocation. Malheureusement, quelques jours plus tard, l’inspection du travail nous a rappelé et nous a demandé d’aller déposer notre plainte au tribunal. Au tribunal, rien n’avance malgré plusieurs plaintes et des relances. Nous sommes abandonnés à nous-mêmes », se désole un ex-employé.
Aujourd’hui, NEO Sécurité de Port-Gentil est fermée. Car, elle a été mise sous scellée le 14 mars 2022, par la direction provinciale des Impôts de l’Ogooué-Maritime, avec interdiction d’exercer jusqu’à nouvel ordre. À cette occasion, le receveur des Impôts lui avait donné huit jours pour régler sa dette fiscale envers l’État. Faute de quoi, « une saisie vente sera réalisée pour le recouvrement des sommes dues à l’État », lit-on dans la notification d’interdiction d’activités et de fermeture d’établissements signée le 14 mars 2022 par le receveur des Impôts, Clémence Flore Okome Ndong.
Intervention des autorités
« Nous demandons l’intervention des autorités administratives, politiques, judiciaires pour que nous rentrions dans nos droits sans délai. Néo Sécurité nous avait dit en début d’année qu’elle ne nous payait pas parce que le client n’avait pas encore réglé sa facture. Aujourd’hui, Perenco a soldé son ardoise vis-à-vis de NEO sécurité », formule Nouhou Marco, porte-parole des ex-agents de NEO Sécurité. Ces déflatés espèrent que leurs pleurs parviendront jusqu’au chef de l’État et qu’une solution sera trouvée. Dans le cas contraire, ils prévoient d’engager des actions visant à rentrer dans leurs droits.
Pour l’instant, la direction générale de NEO Sécurité n’a pas réagi à ces accusations. Le reporter du site Le nouveau Gabon a contacté le directeur général de NEO Sécurité Ruud Gullit Mbinah. Mais, ce dernier l’a orienté vers son conseil juridique qui l’a à son tour orienté vers Fabrice Sambou, l’un des anciens cadres de l’entreprise. Cependant, Fabrice Sambou a affirmé qu’il n’a pas été mandaté par l’entreprise pour s’exprimer sur le sujet. « Je suis dans la même situation que les autres ex-employés. L’entreprise a fermé. J’ai signé aussi un protocole d’accord et je suis en attente de mon paiement également. C’est vrai que c’est moi que le directeur général avait mandaté pour faire signer les protocoles d’accord. Mais, je ne suis pas mandaté pour parler au nom de l’entreprise », a-t-il affirmé.
Sandrine Gaingne