(Le Nouveau Gabon) - En principe, Paul Biya, président en exercice de la Conférence des chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac), accueille ses homologues de la communauté le 18 août 2021 à Yaoundé, la capitale camerounaise, dans le cadre d’un sommet extraordinaire, a-t-on appris de sources autorisées.
Au cours de ce conclave, le chef d’État camerounais et ses hôtes vont plancher sur le thème : « évaluation de la situation macro-économique dans la Cemac en contexte de pandémie de Covid-19 et analyse des mesures de redressement ». L’initiative de la tenue de ce sommet, si l’on se fie aux confidences d’un haut fonctionnaire de la Commission de la Cemac, appartient notamment au Fonds monétaire international (FMI), qui s’inquiète des déséquilibres budgétaires des pays de la sous-région.
En prélude à cette rencontre, le Conseil des ministres de l’Économie et des Finances de l’Union économique de l’Afrique centrale (Ueac) a tenu une session extraordinaire le 10 août à Douala, la capitale économique du Cameroun. Le rapport issu de ses travaux servira de base de travail aux chefs d’État. D’ores et déjà, l’on apprend que la pandémie de Covid-19 a décéléré les résultats positifs générés par la mise en œuvre des réformes prévues par les accords de première génération avec le FMI et dans le Programme des réformes économiques et financières de la Cemac (Pref-Cemac) entre 2017 et 2020.
Plus de 2 747 milliards de FCFA de pertes
Par exemple, « les effets de la pandémie et les mesures fiscales prises pour soutenir l’économie ont engendré des pertes de recettes de plus de 2 747 milliards de FCFA pour l’ensemble de la zone. La résultante mécanique a été de soumettre les pays à un risque de défaut de paiement des échéances immédiates des crédits en cours », soutient-on au sein de la Cemac.
De même, la dette des pays de la Cemac s’est alourdie, passant de 49,1 % en 2019 à 55,6 % du PIB une année plus tard. Pire, deux pays ont franchi le seuil d’endettement communautaire de 70 % du BIP, alors que dans le même temps les autres pays font face à un besoin « de refinancement, de reprofilage ou de restructuration de leurs dettes ».
Sur le plan monétaire, les réserves de change ont perdu plus de 1116 milliards de FCFA en 2020 à cause de la dégradation des comptes extérieurs. L’application sans faiblesse de la nouvelle règlementation de change et la mobilisation de financements extérieurs ont néanmoins permis de limiter les dégâts.
Pour le Comité de pilotage du Pref-Cemac, il faut mobiliser 9048,31 milliards de FCFA pour l’exécution du plan de relance économique communautaire au cours de la période 2021-2025. Mais les 6 pays de la Cemac ne disposent pas d’instruments monétaires et budgétaires capables de mobiliser un tel financement.
D’après le rapport du Conseil des ministres de l’Ueac que SBBC a pu consulter, les mesures de redressement proposées aux chefs d’État s’inspirent fondamentalement des conclusions de l’étude réalisée conjointement par le FMI et la Banque mondiale intitulée : « Renforcer la croissance durable et inclusive dans la Cemac : politiques et réformes structurelles suggérées ».
Programmes de seconde génération du FMI
Ainsi, les ministres de l’Ueac suggèrent aux chefs d’État de faire du plan communautaire de relance post-Covid-19 une cause commune et d’engager les États et les institutions communautaires à une mobilisation accrue des ressources pour son financement. L’exhortation des États à conclure les programmes de seconde génération avec le FMI constituera un autre enjeu majeur du sommet des chefs d’État. À date, seuls le Cameroun et le Gabon les ont conclus.
Le rapport du Conseil des ministres de l’Ueac soutient que la stabilité externe de la Cemac passe par un rapatriement intégral des dépôts de l’administration et autres organismes et entités publics détenus à l’étranger. Le niveau de réserves de change dédiées à la couverture des importations de biens et services et au service de la dette extérieure est passé de 2,2 mois à fin décembre 2016 à 3,2 mois au 31 décembre 2020. En dépit de son relèvement, ce niveau demeure de loin inférieur au seuil optimal de 5 mois requis pour une union monétaire disposant d’assez de ressources naturelles.
Le renforcement de la résilience du secteur financier s’impose aussi. Car le retard accusé dans la mise en place des stratégies d’apurement des arriérés fait partie des manquements majeurs constatés dans la mise en œuvre des programmes de première génération avec le FMI. Ce qui a obéré la croissance et freiné le renforcement de la solidité du secteur bancaire.
Dans le même temps, la Commission de la Cemac sous la férule du Pr. Daniel Ona Ondo, dont le magistère fait souffler un nouveau vent de dynamisme, s’emploiera à intensifier les réformes et l’harmonisation des politiques communes et sectorielles en vue du renforcement de l’intégration sous-régionale.
Dominique Mbassi