Devant la Cour d’appel de Paris le 25 mai 2021, l’Etat gabonais a remporté la bataille dans l’affaire qui l’opposait depuis des années aux sociétés Webcor ITP et Grand Marché de Libreville (GML), rapporte l’Agence Ecofin qui cite l’arrêté de la justice. La Cour d’Appel de Paris confirme ainsi que les deux sociétés ont été impliquées dans une affaire de corruption avec l’ex-premier ministre Jean Francois Ntoutoume Emane dans le contrat pour la construction et la gestion du Grand Marché de Libreville.
L’ancien chef du gouvernement sous Omar Bongo, selon la décision de justice, avait fait bénéficier à ces sociétés, des avantages fiscaux très généreux, moyennant la prise en charge de son luxueux voyage de noces en Afrique du Sud. Ce « cadeau de mariage » précise l’arrêté de la Cour d’Appel, comprend plusieurs billets d’avion en « Business Class » pour des trajets entre Libreville, Johannesburg, Durban et Cape Town pour le maire et son épouse, un service d’accueil VIP personnalisé, ainsi que le coût des séjours hôteliers à Cape Town à l’Hôtel Twelve Apostles, en « Suite Double avec petit déjeuner inclus et Arrangement spécial Lune de Miel "Heaveny Honeymoon Package" ».
Les faits remontent au mois de juin 2010, lorsque Jean Francois Ntoutoume Emane, alors Maire de Libreville, signe un contrat cadre pour la construction et l’exploitation du Grand Marché de Libreville avec la société Webcor ITP Ltd, basée à Malte. Des avantages fiscaux et douaniers exceptionnels sont ensuite accordés à la société Grand Marché de Libreville, bénéficiaire d’un bail emphytéotique, dont le Maire a lui-même été administrateur.
En février 2015, le ministre de l’Economie, suspicieux, fait « suspendre immédiatement l’application de la convention » fiscale. La décision est contestée par les sociétés Webcor ITP et Grand Marché de Libreville qui saisissent la Cour internationale d’arbitrage de la CCI à Paris. Résultat : l’Etat gabonais et la Ville de Libreville sont condamnés à verser aux plaignants un total de 92 millions d’euros (60,4 milliards de FCFA)
L’Etat gabonais n’en reste pas là et demande à la Cour d’Appel de Paris, l’annulation de cette sentence arbitrale avec trois arguments principaux : primo, les documents en question comportaient de fausses signatures, secondo, les avantages fiscaux avaient été obtenus par corruption de Jean Francois Ntoutoume Emane et enfin, tertio, le jeune marié a accordé un bail emphytéotique à une société dont il avait été lui-même administrateur, ce qui constitue un conflit d’intérêt formellement proscrit par la loi.
Au final, ce 25 mai 2021, la Cour d’Appel de Paris a donné raison à l’Etat gabonais et a annulé la sentence arbitrale. Elle a aussi condamné les sociétés Webcor ITP et Grand Marché de Libreville, à verser la somme de 50 000 euros (32,8 millions de FCFA) au Gabon au titre des indemnités.
Rappelons que Jean-François Ntoutoume Emane est également impliqué dans un différend immobilier avec l’Etat gabonais. Une affaire pour laquelle il avait été interpellé en aout 2019 par la police gabonaise avant d’être relâché après quelques heures d’interrogatoire.